mercredi 4 janvier 2012

Associations et partenaires sociaux engagés ensemble (mars 2011)


Associations et partenaires sociaux engagés ensemble
L’expérience menée depuis plusieurs années sur le terrain du Nord Pas de Calais par l’URIOPSS et les partenaires sociaux permet une analyse et des enseignements pour organiser autrement l’avenir.
Reprenons l’enjeu : lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Cela passe aujourd’hui par une doctrine claire, celle de l’accès pour tous aux droits humains fondamentaux, par la mobilisation de tous les acteurs (tous sans exception) et par de sérieuses méthodes d’évaluation. Sur tous ces points, les associations de lutte contre la pauvreté et les partenaires sociaux sont d’accord.

Au fil des années, ce qui n’était qu’une forme d’essai et de tentative d’association des « usagers » s’est transformé en une véritable politique sociale. Plus personne n’envisagerait de laisser les personnes concernées sur le côté. La question reste de savoir jusqu’où l’on peut pousser le curseur de « l’empowerment » des personnes vulnérables, souvent isolées et fragiles, sans représentations et sans soutien. Des dispositifs sollicitent les « usagers » (loi 2002-2 des CHRS), nouvelles dispositions pour le dispositif d’hébergement et vers le logement à travers des comités participatifs, « usagers » ou bénéficiaires attendus dans les équipes pluridisciplinaires du RSA, voire dans les commissions territoriales et les Conseils Départementaux pour l’Insertion. Tout est à faire pour rendre ces processus participatifs réels et cohérents où chaque acteur garde sa place et se sent contributif.

Les politiques publiques se sont largement transformées et les financements sont reconsidérés à l’aune des directives européennes comme des révisions nationales. Faut-il crier « au loup » ou construire des voies nouvelles ? Les deux peut-être !

Au niveau de la région Nord Pas de Calais, le travail s’est réellement mis en route avec le « grenelle de l’insertion » en 2008 et la tentative de créer un forum participatif sur la question. Point d’orgue à Lens au stade Bollaert avec 300 personnes.
Travailler ensemble est une chose possible mais c’est la confiance qui se crée qui va permettre de transformer le cadre et les acteurs. L’animation des évènements construits ensemble se partage sans difficulté et donne « à voir » nos engagements communs.
Puis le RSA en 2009 et la nouvelle gouvernance mise en place par les départements ont conduit à un positionnement plus actif en matière d’accès à l’emploi. Car in fine, c’est bien d’accès à l’emploi qu’il s’agit si l’on veut réellement construire des parcours d’insertion durable. Point d’orgue à Marcq en Baroeul (59)  en juin 2009 avec la présentation des réussites d’insertion dans l’emploi où associations et partenaires sociaux étaient solidairement engagés. L’expérience réalisé à Maubeuge alliant l’entrepreneur, l’association d’insertion locale et le syndicat présent dans l’entreprise s’avère une bonne « pratique » mise en oeuvre localement. La présentation par un entrepreneur (affilié au MEDEF) de son action de soutien aux salariés embauchés dans son entreprise de nettoyage industriel a été aussi un temps de meilleure connaissance mutuelle, dépoussiérant les représentations circulant sur les entrepreneurs.
En perspective, les pactes territoriaux pour l’insertion du RSA constituent des opportunités à saisir de synergies possibles entre associations et partenaires sociaux, avec les entreprises au plan local.
La question posée est de savoir si tout cela, mis en place depuis des années, a réellement de l’impact ou en aura sur le réel et sur les acteurs.

La première étape franchie a été celle du passage du partenariat à une alliance. Alliance par une « Alerte » élaborée et construite ensemble avec une action commune. Ainsi à Dunkerque la semaine de mobilisation sur le « travail décent » a réuni en octobre 2010 des acteurs syndicaux et des associations, ainsi que des personnes en insertion. Mais la question des emplois aidés dans les associations est aussi sur la table, dans le sens où il n’est pas tabou d’en parler et de réfléchir aux enjeux de ces postes. Les associations n’ont pas forcément une claire vision des enjeux pour les personnes et pour elles mêmes. Un dialogue et une réflexion commune sont indispensables à l’heure où les formes d’emploi aidés vont plutôt s’accroitre à nouveau dans les années à venir. Les expérimentations vécues par des associations sont à confronter et à articuler avec les difficultés d’accès à l’emploi à leur sortie du monde associatif. Les associations ont besoin des partenaires sociaux pour y voir plus clair. L’arrivée de statuts nouveaux comme celui des jeunes en service civique constitue aussi un moment à saisir pour mesurer les attentes et les capacités de rebonds à l’issue de ces postes. La validation des acquis de l’expérience (VAE) requiert des formes d’accompagnement qui peuvent conjuguer les compétences de réseaux différents.
La deuxième étape en cours de construction est celle du passage de l’alliance à l’action.

Les réseaux associatifs, les réseaux syndicaux ont besoin de temps pour s’impliquer et travailler ensemble si l’on veut construire dans la durée. Et cela doit maintenant se réaliser au plan local. Il y a seulement quelques années, dire au monde associatif de rencontrer le monde syndical pour « agir ensemble » était impensable. Et pourtant, l’évidence est là que les forces des uns et les compétences des autres construisent de nouveaux modes de pensée, des soutiens plus efficaces pour et avec les personnes en insertion.
Ce qui permet la passage de l’alliance à l’action, c’est aussi le repérage des nouveaux besoins et des situations de nouvelles pauvretés. Dans le Nord Pas de Calais, la question des migrants et des sans papiers reste cruciale. De même, celle des jeunes qui ne pourront pas suivre des parcours dans le secteur de l’insertion par l’activité économique, du fait des changements apportés par les financeurs. Les « travailleurs pauvres », terminologie incroyable tant l’on croyait que l’emploi préservait de la pauvreté, qui cumulent souvent des emplois atypiques et mal rémunérés et qui fréquentent les associations caritatives pour leurs factures d’énergie ou leurs paniers alimentaires, constituent un groupe social en progression qui ne trouvera d’issue meilleure que par une nouvelle mobilisation de tous les acteurs.

Prenons l’exemple du Guide réalisé par Alerte et les Partenaires sociaux concernant l’accès à l’emploi.
Voilà un ouvrage très documenté et qu’il faut s’approprier ensemble pour en faire un véritable guide pour l’action. Nous avons donc déjà pris acte de ce travail et des formes de déclinaisons à construire. Les pactes territoriaux pour l’insertion seront le lieu privilégié d’intervention pour mettre en pratique les préconisations du Guide. Faire ce travail par territoire et le faire ensemble, cela deviendra l’un des points de la feuille de route 2011 du collectif Alerte. De là se mettront en place des animations conjointes de nos réseaux par territoire, en s’appuyant sur les « fora » de personnes en insertion du dispositif RSA ? Mais ne nous leurrons pas, et acceptons qu’il faille du temps aux acteurs locaux pour s’y impliquer.
Avec ce guide de nouvelles questions sont en place, notamment en matière de formations pour les publics les plus éloignés de l’emploi. Faut-il intervenir auprès des Conseils Régionaux quant au Schéma régional des formations, aux programmes de formation et de qualification par territoire, sur les dispositifs OPCA (Organisme Paritaire Collecteur Agrée) par branche professionnelle ou interprofessionnels qui recueillent les financements et les orientent, sur les Conseils Economiques et Sociaux Régionaux (où se retrouvent Partenaires Sociaux et représentants Associatifs) qui peuvent transversalement influer sur les grandes orientations. C’est toute une mécanique qu’il faut appréhender ensemble, au delà des territoires d’affectation historiques pour les partenaires sociaux comme pour les associations. Les associations le demandent et y sont prêtes.

Enfin, l’enjeu global est devenu celui d’aller vers un nouveau pacte social.
Nous avons quitté les rives de l’après guerre et de la période de croissance continue des « trente glorieuses ». Notre aujourd’hui est fait d’incertitudes et d’alternances. Les aller-retour entre l’emploi, la formation, l’inactivité deviennent parcours courants, surtout si les qualifications de base ne sont pas acquises, et même …D’où un éminent besoin d’accompagnement « dedans-dehors » que des réseaux alliés peuvent réaliser. Comment construire des réseaux de soutien efficaces, face aux parcours chaotiques tant sur le plan de l’emploi que celui de l’insertion professionnelle et donc de la formation, celui de la santé, du logement. Plus que jamais la question de l’accès aux droits fondamentaux, le besoin de services sociaux de qualité sont au cœur des alliances et des actions. Cette conviction est à faire grandir au plan local et territorial. D’où des animations d’acteurs, avec des personnes en insertion à mener conjointement. Le rôle de l’Etat change et au delà des péripéties de la réforme des collectivités territoriales, c’est sur les territoires qu’il faut s’engager. C’est un choix résolu qu’il faut faire, par une combinaison de réseaux et des alliances appropriées.
L’alliance qui relie les associations de lutte contre la pauvreté et les partenaires sociaux devient stratégique. Elle doit se mesurer aux réalités et avancer vers de réelles actions, pour et avec les personnes concernées par leur insertion.
Alliances, Actions, Pacte Social, de nouveaux termes et projets pour demain.
Vice-Président URIOPSS Nord Pas de Calais
Article publié dans UNION SOCIALE de l'UNIOPSS mars 2011

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