dimanche 21 octobre 2012

2012 Position URIOPSS 59 62 sur RSA et sanctions


Positionnement de l’Uriopss Nord – Pas de Calais
RSA : sanctions vis-à-vis des allocataires ne respectant pas les obligations légales de contractualisation et/ou d’engagements dans un parcours d’insertion vers l’emploi

Préambule
La généralisation du RSA a fait l’objet de nombreuses prises de position des réseaux associatifs dès son expérimentation et principalement après l’adoption de la Loi du 1er décembre 2008 ou au moment de sa généralisation en juin 2009 : abandon d’une approche globale des individus et de l’accompagnement social, césure entre le professionnel et le social, système d’orientation et moyens dévolus au Pôle emploi, niveau du montant de l’allocation, participation des allocataires, etc.
L’Uriopss Nord – Pas de Calais a aussi fait le choix d’adopter en lien avec ses représentants dans les instances locales d’insertion, et en particulier dans les équipes pluridisciplinaires du département du Nord où l’Union participe, une position de principe quant aux sanctions économiques touchant des allocataires du RSA ne respectant pas le système de droits et devoirs mis en œuvre par la Loi.
Cette position est claire : l’Union s’oppose à tout mode de sanction visant à réduire le montant ou à suspendre le versement de l’allocation, sauf dans l’hypothèse de fraudes avérées.
Analyse des constats
Pour l’Uriopss Nord – Pas de Calais, cette position prend sa source à travers l’analyse de plusieurs constats :
-        Le niveau de ressources des allocataires se situe déjà en dessous du seuil de pauvreté. Il ne nous paraît pas acceptable, a fortiori en temps de crise sociale et économique, de venir diminuer des ressources qui ne sont déjà pas suffisantes pour vivre dignement. Le RSA constitue le dernier rempart contre la grande pauvreté et l’errance et permet à de nombreuses familles de pouvoir réunir le strict minimum nécessaire à l’éducation d’enfants par exemple. Diminuer ou supprimer l’allocation produirait dès lors des effets par ricochet sur les familles des allocataires concernés.

-        Cohérence globale du dispositif et inégalité de traitements entre allocataires : si le RSA activité représente une avancée intéressante dans la lutte contre la pauvreté, la mise en œuvre du droit à l’accompagnement social prévu par la loi ne paraît aujourd’hui pas satisfaisante pour les associations. En effet, la dissociation entre le social et le professionnel et le rôle central du Pôle emploi aux moyens pourtant limités (simple suivi des allocataires provoquant des ruptures d’accompagnement,  des modes d’accompagnement inadaptés et globalement une forte incompréhension du dispositif) ne favorisent pas un bon fonctionnement du dispositif. A ce titre, la bonne compréhension de leurs devoirs par les allocataires ne semble pas certaine et même si nous constatons très souvent un regard « humain » des Conseils généraux dans l’analyse des situations individuelles, la Loi ne peut garantir les allocataires contre « l’arbitraire ». Par ailleurs, il semblerait que les allocataires orientés vers le Pôle emploi « échappent » au contrôle des obligations légales, les transferts de données entre les Conseils généraux et le Pôle emploi n’étant pas opérationnels. Cela conduit dès lors à une inégalité de traitement, car seuls les allocataires dont le Conseil général peut vérifier le respect de leurs obligations (ceux orientés vers le social) sont susceptibles d’être sanctionnés.

-        Le principe d’une sanction économique pour les allocataires ne respectant pas leurs devoirs représente une approche des difficultés des personnes appréciées sous un angle purement individuel, où l’allocataire engage sa responsabilité individuelle dans le traitement des causes de son exclusion sociale. Cette approche idéologique ne nous paraît pas pertinente dans la lutte contre la pauvreté et au contraire fragilise la cohésion sociale.

-        L’aspect pédagogique et re-mobilisateur de la sanction économique ne nous semble pas pertinent dans le cadre d’une approche de travail social. Une approche globale des problématiques de la personne (à travers  par exemple des visites à domicile ou encore des temps d’actions collectives) nous semble plus adaptée pour recréer du lien avec l’allocataire ne répondant plus. En outre, une diminution des ressources aurait pour conséquence très probable une aggravation des difficultés de l’allocataire et dès lors l’engagement de moyens humains et financiers plus important à moyen terme.

Complément JP Bultez
L’approche proposée d’une sanction semble considérer que le contrat ayant été engagé par les deux parties, si l’une d’entre elle (la personne en insertion) ne satisfait pas ou plus à ses engagements, ce serait elle qui devrait être sanctionnée. Comme si les termes d’un contrat mettraient les acteurs à égalité. Nous savons bien que ce n’est pas le cas. S’il y a sanction, il faut aussi pouvoir sanctionner l’autre partenaire (Pole emploi ou CG) qui n’a pas forcément satisfait aux termes du contrat.
Le niveau des ressources : réduire ou supprimer cette allocation de base pose une question éthique : alors que le « non-recours » est plutôt élevé en France (CISS, RSA, …), engager toute forme de réduction conduit à réduire voire supprimer les avantages annexes (tarifs cantines, tarifs transports en communs basés sur les allocations perçues) et à conduire vers l’extrême pauvreté. Qui peut raisonnablement dire que l’on a tout fait pour tenir les termes d’un CER, des deux côtés ?
Qui peut dire qu’une personne n’ayant plus l’allocation RSA, continuera à être accompagnée ? le seul moyen de poursuivre un accompagnement, c’est parce qu’il y a une allocation.
Aller vers la réduction ou la suppression de l’allocation, outre la « désaffiliation » qui s’en suivrait, ne peut que construire une nouvelle forme de marginalité, créée par le système RSA, alors que son objectif est inverse.
Je suis opposé à cautionner toute forme de réduction ou suppression, même temporaire de l’allocation.
Aller dans ce sens sera aussi mettre les bénévoles et les allocataires présents dans les Equipes pluridisciplinaires à vivre un conflit de devoirs, bien insupportables. Y résisteront-ils ?

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